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Pour un véritable partenariat économique Wallonie - Flanders

La Wallonie reste le principal partenaire commercial de la Flandre et vice versa. Pourtant, le potentiel du partenariat économique interrégional reste sous-exploité.

Sur papier, l’équation est simple: la Wallonie fait face à d’importants défis liés à son niveau d’activité économique, à la trop faible part du secteur privé dans la valeur ajoutée qu’elle crée et à la sous-performance de son marché de l’emploi. En revanche, elle dispose de terres, d’une population plus jeune et de main d’œuvre. La Flandre, quant à elle, peut compter sur l’une des économies les plus florissantes d’Europe. Mais sa croissance est freinée par un manque de foncier disponible et une pénurie de travailleurs.

Les synergies paraissent évidentes. Mais Wallonie et Flandre ont longtemps vu la coopération comme un mirage. Pire, les deux régions ont souvent cru que les ressorts de leur croissance se situaient exclusivement au-delà des frontières nationales. Pourtant, même si cela peut paraître farfelu sur papier, une représentation de l’Awex à Anvers aurait probablement un retour économique plus important que bien des agences à l’étranger.

Une fois les élections régionales passées, construire un nouveau partenariat économique devrait être la priorité des nouveaux exécutifs, en particulier wallons. Celui-ci constituerait un puissant levier de redéploiement économique et une réponse politique forte aux défaitistes.

Mobilité interrégionale: l’éternel défi

La mobilité des travailleurs est souvent érigée comme la priorité des dispositifs de collaboration entre Wallonie et Flandre. Et à juste titre: les gains potentiels sont énormes. D’après les chiffres du Forem, entre 45.000 à 65.000 Wallons vont chaque jour travailler en Flandre. 20.000 Flamands font le chemin inverse.

C’est faible, sachant que le précédent partenariat Forem-VDAB, pour la seule période 2018-2022, a permis à 125.000 demandeurs d’emploi francophones de recevoir une offre d’emploi au nord du pays. Sur les quelque 40.000 offres d'emploi disponibles sur le site du Forem aujourd’hui, une bonne partie vient de Flandre. En novembre 2023, le Forem et le VDAB ont d’ailleurs conclu un nouvel accord visant à inciter la mobilité des travailleurs vers la Flandre et à développer les compétences – notamment linguistiques – des demandeurs d’emploi.

Si cet accord s’inscrit dans la bonne direction, on peut lui reprocher l’absence d’objectifs communs précis et chiffrés. Celui-ci se limite à des objectifs qualitatifs qui rendent difficile une évaluation continue des dispositifs.

Pour pallier ce manquement, la Flandre a décidé de se fixer ses propres objectifs. Le VDAB ambitionne ainsi d’insérer, dès 2024, 12.500 demandeurs wallons par an sur le marché du travail flamand, avec un objectif de croissance annuelle de 3%. Imaginez l’ambition: cela équivaut à doubler le nombre total de Wallons travaillant en Flandre en moins de quatre ans! Au Forem et à la Région wallonne de se doter, à leur tour, d’ambitions chiffrées rapidement.

Quelles priorités pour la coopération entre les régions?

S’il veut avoir une portée fondatrice, le nouveau partenariat économique entre nos deux régions devra toutefois aller plus loin. Sur quels chantiers prioritaires devra-t-il se concentrer?

D’abord, l’incitation aux investissements et à l’implantation d’entreprises. La Wallonie dispose, par exemple, de nombreuses friches industrielles. Voilà des sites hautement stratégiques. Ces dernières décennies, leur reconversion a été freinée par les incertitudes liées aux coûts de dépollution et par des processus administratifs beaucoup trop longs. Des réponses politiques et financières devront être apportées, en collaboration avec le secteur privé, afin d’inciter les entreprises flamandes à s’y implanter. Il faudra les convaincre avec détermination et ambition: le ou la prochain(e) ministre-président(e) se doit d’être une sorte de VRP de la Wallonie de Courtrai à Anvers.

Ensuite, la formation et l’enseignement. Des liens renforcés entre les régions passeront par un meilleur apprentissage des langues nationales. Mettre en place des dispositifs facilitant les séjours de moyenne durée dans les écoles secondaires de l’autre communauté linguistique, les stages professionnels et les apprentissages, permettrait de répondre à cet impératif et ce, pour les élèves de toutes les filières. Ces dispositifs pourraient être assortis d’incitants financiers.

Enfin, les deux régions devront renforcer leur coopération dans d'autres domaines où, malgré des gains évidents, les efforts actuels restent insuffisants. Citons par exemple les politiques industrielles, la recherche et le développement, l’aménagement du territoire ou le logement.

Une réponse politique forte et cohérente

Construire un destin commun devrait être la priorité des futurs exécutifs régionaux et communautaires. Des résultats tangibles en la matière dessineraient un horizon politique clair et rassembleur pour notre pays. Ils constitueraient par ailleurs un message politique puissant à ceux qui voient dans la (toujours plus grande) divergence économique entre les régions un horizon indépassable.